Ivan Sergueïevitch Tourgueniev (1818–1883) est une figure majeure de la littérature russe du XIXe siècle. Né dans une famille aristocratique, il grandit entre les exigences de la haute société et le contact quotidien avec le peuple russe, dont il observe très tôt les souffrances et la dignité. Cette double appartenance façonne une œuvre tout en finesse, sensible aux fractures sociales et aux tourments de l’âme.
Humaniste de tempérament, Tourgueniev se distingue par son goût de la mesure, du détail juste, du mot clair. Il rejette les excès et les fanatismes, préférant sonder les cœurs silencieux, les existences discrètes, les douleurs qui n’éclatent pas.
Homme d’ouverture, il voyage beaucoup et séjourne longuement en France et en Allemagne. Il cultive des amitiés littéraires profondes avec plusieurs grands écrivains européens. Son attachement à l’Occident ne l’éloigne pourtant jamais de la Russie, dont il reste un témoin attentif et souvent mélancolique.
Sa prose élégante, musicale, parfois teintée d’ironie douce, refuse les simplismes. Tourgueniev peint la lenteur des vies intérieures, les silences qui en disent long, les élans étouffés. Peu de cris dans ses pages, mais beaucoup d’ombres, de soupirs, d’instants suspendus.
Ni prophète, ni polémiste, il demeure un écrivain du regard — lucide, tendre, inquiet. Sa grandeur est dans la retenue. Il incarne une Russie pensante, inquiète, en dialogue avec l’Europe.